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Le coup d’arrêt a été brutal. L’an dernier, 317 salons qui devaient se tenir à Paris ou dans ses environs ont été annulés ou digitalisés. Ces déprogrammations représentent un manque-à-gagner de 3,4 milliards d’euros pour la région, selon une étude de la Chambre de commerce de Paris Ile-de-France. Dans l’hexagone, à peine 5% des rencontres et des évènements professionnels prévus ont eu lieu, si l’on en croît une enquête d’Atout France et du cabinet EY. Ce phénomène a touché la totalité de la planète. Le Bourget, Vinexpo et Prowein le plus grand salon du vin au monde, le salon de l’agriculture de Paris, la grand-messe américaine de l’électronique et des technologies de Las Vegas (CES), le forum de Davos, le salon automobile de Detroit, le salon des professionnels de l’immobilier de Cannes (Mipim), les salons textiles Texworld, Apparel Sourcing, Avantex, Leatherworld, Shawls&Scarves et Texworld Denim… Cette liste plus longue qu’un jour sans pain fait peine à voir. Mais comme le disait déjà Voltaire, le malheur des uns fait le bonheur des autres…
Un avant et un après
« L’événementiel tel qu’on le connaissait est mort, juge Baptiste Boulard, le directeur général de Swapcard. Il y aura un avant et un après le Covid. » Cet ancien avocat, qui a également décroché un master de finance à l’Ecole des Ponts ParisTech, n’ira pas s’en plaindre. La jeune pousse qu’il a fondée en 2014 et qui compte aujourd’hui 90 collaborateurs est une plateforme tout-en-un qui organise des événements virtuels et hybrides. « L’an dernier, nous avons organisé 1700 événements virtuels en l’espace de six mois et cette année nous devrons franchir le cap des 5000 « events » en ligne ou hybrides », raconte l’entrepreneur comblé. Ce secteur a dû faire sa révolution dans l’urgence même si les graines du changement avaient commencé à germer avant l’arrivée de la pandémie.
Mieux vaut tard que jamais
« L’événementiel souffrait depuis plusieurs années déjà, constate Baptiste Boulard, tout comme l’expliquait à INfluencia, Patrice Perret récemment. Les gens étaient de moins en moins nombreux à se déplacer car ils questionnaient le retour sur investissement de ces rendez-vous qui leur coûtaient cher et dont ils n’avaient aucun moyen de quantifier leur efficacité. Le business model de ce secteur était obsolète mais il permettait encore à ses acteurs dominants, comme les logisticiens, les constructeurs de stands et les propriétaires de parc d’exposition, de gagner beaucoup d’argent. Ces derniers ont donc longtemps résisté à l’idée de créer des événements virtuels ou hybrides mais la crise sanitaire les a contraints à investir massivement dans le digital pour survivre. » Un retour en arrière vers le modèle « pré-Covid » est improbable pour ne pas dire impensable.
Vive la digitalisation
Pour s’en assurer, Swapcard vient de réaliser une étude auprès de 352 experts de ce secteur. Si à peine 11,5% d’entre eux prévoient d’organiser à l’avenir des événements uniquement virtuels, 82,5% des sondés vont mettre en place des modèles hybrides et à peine 5% imaginent proposer exclusivement des rendez-vous physiques. Après avoir étudié un échantillon de 461 événements virtuels qui ont vu la participation de 1,6 million de participants et ont généré près de 5,5 millions de prospects, la start-up française a détecté plusieurs tendances. La durée optimale d’un salon virtuel est de deux jours et 95% des prospects sont générés les jours qui précèdent sa mise en ligne. L’observation des sessions est aussi largement privilégiée par rapport au réseautage (80% vs 5/6% du temps). Cette digitalisation est une excellente nouvelle pour les « exposants » et les organisateurs d’événements en ligne même si beaucoup en doutent encore.
Tracker, tu seras…
« La collecte de datas permet de tracker les parcours des visiteurs et de les améliorer sans cesse, juge Baptiste Boulard. Le numérique aide aussi à transformer un événement en une communauté. Le modèle hybride va permettre de croître de façon exponentielle son public. Les organisateurs ne vont plus réfléchir comme des logisticiens mais comme des marques. La phase de préqualification des visiteurs se fera en ligne, un ou deux rendez-vous physiques seront maintenus chaque année et des communautés très fermées seront créés afin de permettre à ces personnes de se rencontrer pour échanger sur des thèmes bien précis. Pour garder un lien tout au long de l’année, des contenus seront diffusés sur le net. Les spécialistes de l’événementiel vont devenir des médias. GL Events l’a bien compris en créant Sirhafood qui est une plateforme destinée à promouvoir tous ces événements centrés sur le food service et l’hospitalité. » La pandémie a tout changé pour le meilleur et pas forcément pour le pire…