8 juin 2021

Temps de lecture : 5 min

Elisabeth Billiemaz, présidente de Brand Station et co-présidente de Change : « Préserver l’intuition dans notre métier nous parait primordial ».

Associée fondatrice d’Enjoy de 1998 à 2007, puis DG de H et Présidente de l’agence Les Gaulois devenue Human Seven en 2017, Elisabeth Billiemaz est depuis un an co-Présidente du groupe Change et Présidente de Brand Station.
INfluencia : nous referiez-vous le film du rapprochement entre Change et Brand Station ?

Elisabeth Billiemaz : au départ de cette aventure il y a Change, un petit groupe indépendant créé il y a 13 ans par Patrick Mercier. Puis il y a un an et demi, ce fut le rachat par Change à Loïc Chauveau de Brand Station, société spécialisée dans le social media, et l’activation de marques à fort impact conversationnel que ce dernier avait créée il y a sept ans. J’ai repris la présidence de Loïc qui souhaitait se consacrer à d’autres aventures professionnelles.

IN. : comment reprend-on la présidence d’une agence en mars 2020, en plein confinement ?

E.B. : A situation extraordinaire à laquelle nous nous sommes tous adaptés, avènement extraordinaire, comme vous pouvez l’imaginer. Mon « intronisation » s’est faite en visio-conférence. J’ai pu m’appuyer sur le cœur battant du l’agence : Samy Benama et Damien Guiol qui sont depuis septembre 2018 à la direction de création, Victoire Thiesse qui est en charge de la direction des stratégie, Léa Bellaiche directrice commerciale et Xavier Delaporte, DGA charge du développement. Une très belle équipe.

IN. : comment définiriez-vous la philosophie de ce nouvel ensemble ?

E.B. : il y a la réflexion que nous menons avec l’équipe, autour de ce qui nous lie avec nos clients, quel est notre rôle et surtout avec qui nous travaillons. La société est mutante. Nous vivons actuellement une transition mixte, faite de technologie et d’écologie. Nous avons fait le constat que nous accompagnons des marques qui veulent faire bouger les lignes en changeant positivement la société et qui font le choix de le dire différemment des autres. Nous les avons baptisés « les néo-challengers ».

IN. : qu’apportez-vous à vos clients qu’ils n’aient déjà ?

E.B. : je pense que nous apportons aux marques des idées nouvelles qui leur permettent d’accélérer leur popularité et d’exprimer leur singularité. Cela passe par des approches qui mettent ces marques dans leur époque . On pourrait appeler cela un « good culturel ». Ce que je constate au quotidien n’est pas le seul fait de nouvelles marques comme par exemple Poulehouse qui se bat pour le bien-être animal, mais aussi des marques plus établies qui viennent vers nous comme Cadum . Des marques nées avant les bouleversements sociétaux ont l’obligation mais surtout le courage de muter car cela coute cher d’apporter le changement. Ce n’est pas rien, d’un point de vue industriel, économique, identitaire de se voir dans l’obligation de changer, de transformer son entreprise. Ces marques-là nous les faisons évoluer avec bonheur parce qu’il y a un enjeu fort…

IN. : quels exemples de campagnes culottées et engagées vous paraissent intéressantes au sein de votre nouvelle maison ?

E.B. : sans réfléchir, comme ça, je dirai que le guide de la déconnexion que nous avons conçus pour Orange, est une démarche engagée, originale, inattendue. Nous sommes allés parler aux gens là où ils ne nous attendent pas , puisque ces guides sont disponibles dans des circuits de librairies. TBS que nous accompagnons pour sa communication pour lequel nous avons proposé un « recyclage de campagne », pour ses maillots éco-conçus. Je dirai que l’opération pour les 60 ans de Play-Doh est remarquable dans le sens où elle est à la fois événementielle : exposition au MAM -Musée d’Art Moderne d’une œuvre réalisée par un enfant durant une semaine, conversationnelle, ce dont les marques ont besoin désormais. Enfin Marques Avenue qui revendique l’outlet comme un mode de consommation raisonné et pour qui par exemple nous avons demande à l’artiste Tank de peindre les affiches de soldes afin de les vendre aux profits des étudiants pendant la covid.

IN. : Orange, TBS, Play-Doh, Fondation des Hopitaux, Kline sont de nouveaux clients, vous avez également apporté dans votre besace, Marques Avenue, et là aussi, disruption au programme. Diriez-vous que votre agence fonctionne d’une manière nouvelle ? Ou en tout cas moins verticale que par le passé ?

E.B. : nous avons une culture très « social », effectivement notre fonctionnement est plus horizontal. C’est culturel et générationnel. Dans notre rythme de travail interne, la création est plus au cœur du processus de réflexion que dans d’autres agences. Avant de partir en strat, des que nous avons un brief, nous nous voyons dans les heures qui suivent dans ce que nous appelons une « intuitive room » avec la direction de la création, planning stratégique… Préserver l’intuition dans notre métier nous parait primordial. Nous intégrons aussi le client pour cette nouvelle timeline de travail. Nous partageons le brief agence avant de partir en création.

IN. : quel est aujourd’hui le rôle de la « pub » auprès des annonceurs ?

E.B. : la publicité n’est pas magique… Nous ne pouvons agir pour les marques que si elles sont elles-mêmes conscientes de la mutation qui est mondiale. S’il n’y a pas de réalité tangible, il n’y a pas de communication qui sauve. Et puis soyons très clairs aujourd’hui, les solutions sont loin de n’être que publicitaires… Nous sommes là pour créer l’étonnement, et pour ce faire il n’y a pas de lieu privilégié. On revient a la publicité au premier sens du terme, rendre public dans la cité. Tous les points de contact sont appelés à surgir de nos réflexions, créer de nouvelles audiences, est notre crédo. Pour cela il faut faire confiance à l’intelligence des gens et dans ce cas, l’engagement est au rendez-vous.

IN. : vous qui avez vécu des aventures publicitaires à l’époque bénie de la com avec des talents tels que Benoit Devarrieux , Gilbert Scher ou Gabriel Gauthier, qu’est-ce qui vous motive aujourd’hui ?

E.B. : et bien l’aventure que j’ai adorée est évidemment celle d’Enjoy il y a 20 ans. C’est ce que je suis en train de revivre aujourd’hui avec Patrick et l’équipe. Une entreprise indépendante à développer, de nouvelles façons de communiquer, un dynamisme, une liberté, une énergie que j’avais hâte de retrouver…

IN. : vous avez une phrase sorte de mouton à cinq pattes qu’on aime bien…

E.B. la communication consiste à comprendre celui qui écoute. C’est celle-là, non ?

IN. : si vous faites un point sur la com d’il y a 20 ans et celle d’aujourd’hui , quels seraient vos regrets et vos enthousiasmes?

E.B. : on peut regretter la valeur accordée à notre expertise qui à l’époque était au rendez-vous, tant au niveau de la rémunération, que de la confiance que nos clients avaient pour notre métier. A l’époque on croyait et aimait la pub. D’un autre côté, aujourd’hui les marques doivent tellement se transformer qu’elles ouvrent leur porte sur des sujets plus globaux car la priorité est de construire des preuves . Nous devons être encore plus créatifs, sur des problématiques de services, de produits , de distribution, d’engagements, sur tout ce qui créé de la valeur pour les marques c’est ça notre métier. Nous avons plus que jamais une responsabilité et un rôle à jouer.

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