INfluencia : les banques semblent découvrir la valeur des données qu’elles collectent grâce aux transactions de leurs clients. Comment l’expliquer ?
Charles de Gastines : l’évolution de la législation – avec la directive européenne DSP2 – est une explication, mais ce n’est pas la seule raison. Les banques sont de plus en plus challengées, que ce soit par les néobanques ou les banques en ligne, mais surtout par les « big tech » comme Apple et Google en Europe, qui entrent sur le marché, avec le paiement mobile. En outre, pour les banques traditionnelles, les agences représentent de moins en moins des atouts pour faire la différence, et de plus en plus des coûts. Par contre, la donnée a une valeur colossale, qu’il va falloir exploiter rapidement, alors que les Big Tech se montrent de plus en plus agressifs pour la capter.
IN. : en quoi ces données bancaires représentent-elles une source de valeur ?
CH.de.G. : quand le web est arrivé, il a créé la donnée de navigation, qui a donné naissance au retargeting et au ciblage. Quand Google est arrivé avec son moteur de recherche, il a créé la donnée de recherche et le search marketing. Puis les réseaux sociaux ont créé le social marketing. Avec la donnée de paiement, on est en train de créer une nouvelle catégorie au sein du marketing à la performance : le payment marketing. Notre métier est de collecter la donnée transactionnelle, en opt-in, pour l’enrichir et en faire un levier de connaissance client. Cela permet ensuite à des banques et fintech de proposer des programmes de fidélité personnalisés et simples pour l’utilisateur. Depuis un an, nous observons une accélération très forte de l’intérêt des banques pour ce sujet du payment marketing. Pour un groupe bancaire, il représente en effet deux opportunités : créer un levier de fidélisation pour leurs clients et répondre à la concurrence des GAFA, dont le modèle repose en bonne partie sur le marketing à la performance.
IN. : concrètement, cela ressemble au cashback, avec des réductions sur certains achats des clients, que vous détectez grâce aux données de paiement : en quoi c’est nouveau ?
Ch.de. G. : Avec Paylead, nous apportons une valeur sonnante et trébuchante aux consommateurs en échange de leurs données transactionnelles. En termes d’expérience utilisateur, c’est extrêmement différent des solutions de cashback « cookie-based » qui existent depuis longtemps sur le web. Ce terme de cashback est d’ailleurs un peu galvaudé. Il restitue mal la complexité de notre technologie, qui permet une expérience extrêmement simple pour l’utilisateur, avec des offres proposées de manière immédiate.
IN. : comment vos clients y trouvent-ils leur compte ?
Ch.de. G. : une grande partie de notre métier est de prouver par l’analyse de la donnée bancaire qu’on génère des achats incrémentaux pour les commerçants. Nous utilisons par exemple des groupes de contrôle, qui permettent de comparer les comportements des clients qui ont reçu les offres avec ceux qui ne les ont pas reçus. Cet aspect performance est important, mais il y a aussi un enjeu de volume : nous devrions atteindre 3 millions de consommateurs actifs sur notre plate-forme d’ici à la fin de l’année. Du côté des banques, le payment marketing est une bonne manière de s’inviter dans le budget des distributeurs et de contrer les GAFA sur leurs propres modèles économiques.