1 juillet 2021

Temps de lecture : 4 min

Caroline Renoux, fondatrice du cabinet de recrutement Birdeo : « pour la 1ère fois il y a une pénurie de profils RSE »

Le cabinet de recrutement Birdeo, pionnier des cabinets spécialisés dans le développement durable et l’Impact, vient de publier la 5è édition de son étude menée auprès de 800 professionnels de la RSE et du développement durable. Le dynamisme du recrutement en la matière est l’occasion de mesurer la transformation effective des entreprises vers plus de Good. Échanges avec Caroline Renoux, la fondatrice de Birdeo pour décrypter les tendances du marché de l’emploi « durable ».
The Good : Vous avez fondé Birdeo en 2010 et vous menez cette étude auprès des professionnels de la RSE tous les deux ans. Quels sont les points marquants de cette 5ème édition ?

Caroline Renoux : La principale différence est que le périmètre a totalement changé.

Avant la RSE, le développement durable, c’était un sujet d’expert, pour les experts, voire un peu confidentiel. Dans le contexte de l’étude aujourd’hui, c’est un sujet qui a totalement explosé. On le voit notamment sur le téléchargement de l’étude, qui a été téléchargée plus de 1000 fois depuis sa récente mise en ligne. C’est autant que le téléchargement total de notre étude précédente en 2 ans.

Le premier fait marquant est que nous sommes passés de professionnels de la RSE quasi-exclusivement généralistes à des profils de spécialistes : un spécialiste climat, un spécialiste diversité, etc…Ce sont des postes nouveaux, qui viennent étoffer les équipes.

Le deuxième fait marquant est que pour la 1ère fois, il y a globalement une pénurie de compétence sur le sujet. C’est vraiment nouveau, les entreprises ont du mal à recruter.

De ces deux faits, découle le 3è fait marquant :  les entreprises font de plus en plus appel à des freelances, pour leurs besoins d’expertises. Les sujets deviennent davantage stratégiques, il y a plus de budget pour recruter des experts.

On note également la montée du label B Corp et de la Société à mission. Beaucoup d’entreprises, dont de grandes entreprises réfléchissent à ce label. Enfin on note aussi une petite évolution des salaires à la hausse, pour un secteur qui était traditionnellement plus bas que les autres.

TG : Comment évolue la demande ? Quels sont les secteurs qui recrutent le plus ?

CR : Si les grandes entreprises recrutent des profils RSE depuis le début, on note qu’elles créent de nouveaux postes, souvent avec une double casquette, par exemple contrôle de gestion + reporting extra-financier ou achat + sourcing responsable.

Dans le secteur du conseil c’est l’explosion des postes, c’est là qu’il y a une véritable pénurie. Les départements développement durable des plus gros cabinets ont besoin de grandir, au regard de la demande croissante sur le sujet. Tout comme les pures players spécialisés sur les sujets carbone, biodiversité, etc… Les fonds d’investissement et les banques recrutent beaucoup, sur les sujets de finance responsable.

Les ETI, qui étaient peu sur ces sujets, sont dans une vraie transformation : à la fois parce que leurs grands donneurs d’ordres sont en demande, parce que les consommateurs sont plus exigeants et parce que c’est nécessaire aussi pour être financé, notamment par les fonds d’investissement.

Enfin, les secteurs comme le parfum, la cosmétique, ou la mode, qui était assez en retard sur le sujet, connaissent une vraie accélération, notamment depuis le Fashion Pact en 2019.

TG : Quelles mutations avez-vous observées dans le recrutement RSE : types de postes, profils, compétences ?

Un premier constat intéressant est que les directions durables nouvellement créées ou renouvelées sont le plus souvent rattachées au Comex, ce qui montre que c’est une fonction qui prend de l’ampleur au niveau stratégique. Cela induit une seniorisation des postes.

Pour répondre au besoin d’expertise, on note le développement de postes très techniques sur le climat ou la biodiversité, et ceux qui ont une « double compétence », dans les directions financières, les achats ou le marketing durable.

En termes de compétences, ce sont des postes qui sont assez exigeants. Porter les valeurs c’est nécessaire mais absolument pas suffisant. Il faut avoir une excellente culture générale sur la RSE. On nous demande de plus en plus des gens qui ont un réseau, voire un leadership d’influence, pour aller plus vite. Les profils de conduite du changement sont très demandés, tout comme la capacité à entrainer les autres. Si ce sont des postes qui font rêver, ils nécessitent aussi du courage, de la ténacité et beaucoup d’humilité aussi, car on tâtonne, on se trompe, on essaye autre chose.

TG : Quelles sont les formations qui mènent aujourd’hui aux métiers de la RSE ?

CR : Les parcours et les profils sont extrêmement variés (ingénieurs, écoles de commerce et assimilées, Sciences-Po) mais la dimension « RSE » est obligatoire. Cela passe par une spécialisation en formation initiale ou par une année de formation en master comme à Dauphine, Léonard de Vinci ou les Mines. D’autres formations comme les Masterclass 21 ou le Mooc de l’université de Cambridge sont intéressantes.

TG : La transformation digitale a apporté son lot de nouveaux métiers. Qu’en est-il de la transformation RSE ?

CR : Dans les nouveaux métiers on trouve par exemples les « stakeholders program manager » – des chefs de projets parties prenantes en français, qui ont la charge du dialogue avec les parties prenantes. Dans la finance, la prise en compte des aspects sociaux et environnementaux amène à revoir amène des postes très nouveaux.

Il y aura toujours une direction RSE, pour donner sens, de nouvelles tendances, et pour la dimension reporting extra financier et les contraintes légales, mais la clé de la réussite c’est infuser la RSE au maximum dans les différents départements.

TG : Comment voyez-vous les prochaines années chez Birdeo ?

CR : Notre feuille de route c’est l’international et notre plateforme People 4 impact : pouvoir proposer des managers de transition et des experts sur les sujets techniques. Ce sont des profils d’experts freelance que nous validons avec la même rigueur qu’en chasse de têtes et que nous accompagnons à se positionner versus les offres. Nous avons actuellement 1500 experts sur la plateforme, à qui sont proposées des offres de missions de quelques jours à 12 mois.

Ce papier a d’abord été publié sur The Good

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