On s’en doutait, c’est aujourd’hui officiel. Les réseaux sociaux sont désormais le média le plus indispensable pour les consommateurs. L’année dernière, les audiences de YouTube ont dépassé, pour la toute première fois, celles de la télévision traditionnelle. En comptabilisant plus de 42 millions d’usagers pour un temps moyen de 41 minutes par personne chez les 15-49 ans, la plateforme de diffusion de vidéo dépasse TF1, la première chaîne française. Le PDG du groupe basé à Boulogne-Billancourt (92), Rodolphe Belmer, reconnaissait d’ailleurs récemment que le géant américain du web était « son principal concurrent ». C’est dans ce contexte que l’agence d’influence marketing Reech vient de publier les résultats de sa 9ème étude annuelle réalisée avec l’institut de sondage Norstat.
Un marché en pleine croissance
Depuis plusieurs années, le marché de l’influence ne cesse de croître. Les particuliers en ont de plus en plus conscience. Plus de la moitié (58%) des 1000 utilisateurs des réseaux sociaux représentatifs de la population française questionnés dans cette étude déclarent ainsi connaître la notion de « créateurs de contenu », un résultat bien meilleur chez les 18-34 ans (71%) que chez les 35-54 ans (51%) ou les 55 ans et plus (37%). Si ces plateformes sont aujourd’hui utilisées par tous les internautes ou presque, le nombre « d’accrocs » les yeux rivés sur leurs écrans de jour comme de nuit commence -enfin- à décliner. Les plus gros consommateurs qui surfent plus de trois heures par jour représentent aujourd’hui à peine 13% des amateurs des réseaux sociaux contre 16% en 2023. La majorité des sondés cette année passent entre 30 minutes et une heure sur les plateformes sociales (29% vs. 25% en 2023). Les moins de 35 ans, qui sont les plus gros utilisateurs des réseaux, les consultent en moyenne 1h54 quotidiennement, contre 52 minutes pour les 35-54 ans et 41 minutes pour les 55 ans et plus.
Facebook toujours en tête
La plateforme préférée des particuliers reste Facebook, n’en déplaise à ceux qui l’accusent d’être « le réseau social des vieux ». Le poids lourd de Meta fait même mieux que conserver sa place de leader du réseau le plus utilisé puisqu’il gagne 2 points par rapport à 2023. Instagram poursuit, lui aussi, sa progression. 64% des personnes interrogées la considèrent comme leur plateforme préférée (+5% en deux ans). TikTok gagne, lui aussi, 5 points. La grande surprise de cette enquête est la forte croissance du réseau social professionnel LinkedIn qui séduit 24% des utilisateurs (7 points de plus qu’en 2023). Le petit dernier BeReal entre dans le classement en attirant directement 7% des utilisateurs des réseaux sociaux. En revanche, X (ex-Twitter) connaît une forte baisse. Seuls 21% des sondés le citent contre 27% en 2023. Elon (Musk) est meilleur dans les fusées que sur le net… Ces chiffres n’ont pas un impact direct sur les comportements des influenceurs et des marques.
Les marques préfèrent Instagram
« Instagram reste le réseau social unanime des annonceurs, à 95%, et des créateurs de contenu, à 98%. Et pourtant, il ne rassemble que 64% des utilisateurs, constate Claire Decommer, Lead CSM chez Reech. C’est l’inverse pour Facebook, utilisé par 77% des consommateurs mais mis de côté par les annonceurs (29%). De manière générale, les annonceurs semblent avoir misé fortement sur Instagram, au détriment d’autres réseaux pourtant très utilisés. » Ce comportement à priori surprenant, pour ne pas dire illogique, s’explique… « Instagram a presque été conçu pour satisfaire aux besoins des marques alors que Facebook est resté dans l’imaginaire des consommateurs comme un réseau social pur et dur qui permet de rester en contact avec ses amis et sa famille, ajoute Claire Decommer. Les annonceurs ne font donc pas d’erreur de jugement lorsqu’ils ne passent pas par Facebook pour diffuser leurs collaborations commerciales. »
La télé-réalité n’a plus la cote
Les marques savent également que les contenus des créateurs sont vus par des internautes qui ne suivent pas forcément leurs comptes. 55% des Français regardent ainsi régulièrement des vidéos ou des photos d’influenceurs sans être abonnés à leur profil. Aujourd’hui, 41% des particuliers sont abonnés à des créateurs de contenu. Les plus jeunes sont, fort logiquement, ceux qui s’abonnent le plus : 63% des 18-34 ans contre seulement 23% des 35 ans et plus. L’étude révèle aussi que les créateurs de contenu sont désormais plus populaires que les célébrités. 64% des sondés déclarent ainsi suivre des créateurs de contenu dont c’est le métier. Ils apprécient tout particulièrement les passionnés (59%) qui partagent leur hobby et les artistes (47%). Les stars de la télé-réalité (-11 points) et les personnalités publiques (-7 points) sont, pour leur part, en perte de vitesse, au contraire des artistes (+19 points), des passionnés (+15 points) et des entrepreneurs (+9 points).
Surfer pour rigoler
Quand on leur demande les raisons qui les poussent à surfer sur les réseaux sociaux, nos compatriotes ont des réponses variées. La diversification de leurs centres d’intérêt est palpable. Les sujets les plus suivis en 2024 sont l’humour suivi par la nourriture et la mode. Les sujets beauté et cosmétiques perdent l’intérêt de 5% des répondants par rapport à 2023, et 7% d’entre eux s’intéressent moins aux contenus liés à la famille. Le divertissement est recherché par la majorité des utilisateurs. À la question « que vous apportent les créateurs que vous suivez ? », 72% des sondés affirment regarder des contenus pour se divertir (contre 57% en 2023), ils font rire 54% d’entre eux et permettent l’évasion à 36% des répondants. Pour d’autres abonnés, c’est principalement l’apprentissage qui est recherché. 55% s’informent ou trouvent des idées grâce aux créateurs qui sont perçus de façon extrêmement positive, entre confiance, admiration et sympathie (pour 66% d’entre vs 61% pour la sympathie en 2023). Mais 92% des utilisateurs sont prêts à arrêter de suivre un créateur de contenu qui franchirait une ligne rouge, en premier lieu sur la désinformation pour 61%, suivi de la surconsommation à 51%.
Des partenariats ? Et alors…
4 consommateurs sur 5 déclarent, par ailleurs, avoir conscience des réalités de cet écosystème et notamment du modèle économique qui repose en grande partie sur les partenariats. Cette réalité est connue et de plus en plus acceptée mais les accords commerciaux doivent être clairement annoncés : 72% des personnes interrogées exigent la transparence des partenariats (+4 points vs. 2023) et refusent la publicité déguisée. Parmi tous les supports publicitaires, les publicités réalisées par les créateurs de contenu sont de loin les plus appréciées. C’est le cas pour 31% des répondants contre seulement 17% qui préfèrent celles de la télévision. Mesdames et messieurs les annonceurs, retenez bien ces chiffres. Beaucoup ont déjà compris comment fonctionnait ce modèle. « Les marques font de plus en plus confiance à la patte créative des créateurs de contenu, note Claire Decommer. Elles sont bien moins directives lorsqu’elles signent des partenariats. Dans le passé, elles donnaient des briefs très précis qui brouillaient l’identité des influenceurs et qui énervaient leurs abonnés. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. » Les Français se font néanmoins une idée fausse de « l’eldorado » des réseaux sociaux. Beaucoup pensent que les créateurs de contenu gagnent des fortunes sur la Toile alors que leur revenu médian se situe, en réalité, autour de 1600 euros. Parfois, le gouffre est large et profond entre le rêve et la réalité…
