13 janvier 2025

Temps de lecture : 4 min

Agnès Vahramian (franceinfo) : « Elon Musk se positionne comme le rédacteur en chef de la planète »

La 7e édition de Médias en Seine qui se déroule demain aura pour thème : « Médias, l’ère des défis ». Agnès Vahramian, la directrice de franceinfo, qui est avec Les Echos-Le Parisien, un des organisateurs de cet événement, nous en dit plus…

INfluencia : Avant toute chose, félicitations… Le dernier classement Médiamétrie pour les mois de novembre et décembre 2024 confirme votre place de deuxième plus grande radio de France avec une audience cumulée de 9,3% (+0,4%) et un gain de 200.000 auditeurs. Difficile de mieux commencer l’année…

Agnès Vahramian : C’est en effet une très bonne performance dans le contexte actuel et une excellente nouvelle pour les équipes de Franceinfo mais aussi pour Radio France et l’information en général…

IN : franceinfo est avec Les Echos-Le Parisien un des deux organisateurs de Médias en Seine. Quelles sont les spécificités de cet événement ?

A. V. : Médias en Seine est un événement central de l’année en raison de la qualité des interlocuteurs et de son format de tables rondes qui sont assez longues puisqu’elles durent 45 minutes. Ce rendez-vous n’a pas pour vocation de retracer l’histoire des médias ou de faire des travaux universitaires. Il est et a toujours été très ancré avec l’actualité du moment. C’est pour cela qu’il attire autant de monde. Nous avons ainsi déjà 5000 inscrits pour cette septième édition.

Médias en Seine est également très tourné vers l’international et notamment vers le monde anglo-saxon. Nous accueillons des intervenants du monde entier. Cette année, Luc Julia, le directeur scientifique de Renault, Nikita Roy, la fondatrice du Newsroom Robots Lab et des experts canadiens seront présents.

IN : Comment a évolué cet événement durant ses 7 années d’existence ?

A. V. : Le format fonctionne, il n’a donc pas beaucoup changé au fil des ans. Mais cette année, nous avons décidé de penser une édition hybride avec une large matinée en présentiel à la Maison de la Radio et de la Musique qui accueillera le grand public et une après-midi sur invitation et en streaming au siège du groupe Les Echos-Le Parisien. Les tables rondes seront donc moins nombreuses mais prestigieuses avec des intervenants très haut de gamme. Une chose est sûre, Médias en Seine s’est installé au fil des ans comme un rendez-vous incontournable pour les professionnels des médias et le grand public.

IN : Comment s’organise le partenariat entre franceinfo et Les Echos-Le Parisien?

A. V. : Nous travaillons extrêmement bien ensemble car nous collaborons depuis plusieurs années maintenant. Chaque média a un programmateur consacré à cet événement. Nous partageons nos compétences qui sont très complémentaires et nous entretenons une réelle relation de confiance.

IN : Quel est le rôle des annonceurs dans cet événement ?

A. V. : Il est très important pour eux d’être au cœur de nos réflexions et de nos débats. Leur intégration au sein de notre événement se fait très naturellement car ils ont tous dans leurs effectifs des personnes qui peuvent légitimement participer à nos tables rondes.

IN : Quels sont les principaux enjeux de cette édition ?

A. V. : Ils sont triples. Ils sont tout d’abord démocratiques. Nous allons, comme chaque année, publier le baromètre La Croix-Verian-La Poste qui mesure la confiance des Français dans les médias. Cette étude va nous aider à réfléchir sur les raisons qui expliquent la défiance et la désaffection du public vis-à-vis des médias. Nous vivons une période dans laquelle la confusion est importante. La désinformation est partout. Beaucoup de questions se posent à nous. Nos médias dits traditionnels doivent-ils quitter X et les grandes plateformes ? Ces réseaux sont-ils nos concurrents ou nos partenaires ? Aujourd’hui, la vérité est toute relative. La récente annonce de Mark Zuckerberg de stopper la modération sur Meta et ses réseaux Facebook et Instagram le prouve encore un peu plus.

Le second défi que les médias doivent relever est économique. Comment peuvent-ils trouver les ressources qui leur permettront de vivre ? Les gens sont-ils prêts à payer pour être informés et si oui, combien ? Le financement des médias du service public doit-il être sanctuarisé ? On a vu, lors des dernières élections américaines, que la campagne des candidats ne se faisait pas dans les médias traditionnels mais sur les plateformes des influenceurs.

Le troisième défi est technologique. L’intelligence artificielle est là alors parlons-en mais de manière posée et sans aucune hystérie. L’IA va t-elle changer nos métiers et si oui, de quelle manière ?

Il est très important de réfléchir tous ensemble à ces questions. Médias en Seine a cette particularité de rassembler tous les acteurs des médias. Il n’existe pas d’événement comparable dans ce secteur très concurrentiel dans lequel nous avons tous tendance à travailler chacun de notre côté. C’est réjouissant de retrouver tout le monde sur un seul et même lieu. L’idée n’est pas de se regarder le nombril mais de réfléchir à l’avenir de l’information.

IN : N’existe-t-il pas d’événement comparable à l’étranger ?

A. V. : Pas vraiment. Aux Etats-Unis notamment, il n’en existe aucun qui ressemble au nôtre.

IN : Les médias dans ce pays, qui sont de plus en plus menacés par les plateformes et le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, auraient pourtant plutôt intérêt à se rassembler pour survivre…

A. V. : En effet… Le monde des médias est en plein bouleversement aux Etats-Unis. CNN chute inexorablement, les médias locaux ont quasiment disparu tout comme le print, le payant est la règle… Il est important de regarder ce qui se passe là-bas même si notre modèle est différent avec l’existence, notamment, d’un service public de l’information. Personne notamment ne connait les conséquences de la fin de la modération sur les plateformes. Elon Musk se positionne comme le rédacteur en chef de la planète. Comment pouvons-nous réagir face à cela? Musk a 200 millions de followers. Aucun média dans le monde peut revendiquer avoir 200 millions de lecteurs. Comment peut-on appréhender ces nouveaux maîtres de l’info ? Lutter contre eux n’est, selon moi, pas la bonne méthode à suivre. Il est primordial pour nous de livrer une information brute et de laisser les gens se faire leur propre opinion. Toutes ces questions sont passionnantes. Nous n’avons pas encore toutes les réponses à ces interrogations. Si c’était le cas, nous n’aurions plus besoin d’organiser Médias en Seine…

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