INfluencia : Qu’est-ce que le « social listening » ?
Virginie Barbieri : Il y a quinze ans, les réseaux sociaux commençaient tout juste à se développer. Sonia Lecommandoux et moi travaillions à l’époque dans le service marketing de SFR. Le début des années 2000 était l’âge d’or des Telcos. Ces entreprises étaient à la pointe de l’innovation, un peu comme Google ou Meta aujourd’hui. Nous utilisions énormément d’études quanti et quali pour tenter de comprendre les besoins des consommateurs. Avec Sonia, nous avons, au fil du temps, réalisé que les réseaux sociaux étaient une véritable mine d’or car les avis des internautes sont une prise de parole spontanée et moins biaisée que celle étudiée dans les études quali et quanti. Nous avons donc choisi en 2011 de lancer notre propre société que nous avons baptisé SemantiWeb.
IN. : De quels outils disposiez-vous pour étudier les contenus diffusés sur les réseaux sociaux ?
V. B. : Nous avons levé un peu de fonds pour créer un outil capable de catégoriser les données que nous récoltions. Au fil du temps, nos outils se sont améliorés. Notre technologie propriétaire de structuration de la data conversationnelle est aujourd’hui boostée par l’intelligence artificielle générative et nous nous servons aussi beaucoup d’autres outils disponibles sur le marché.
IN. : Des clients vous ont-ils rapidement fait confiance ?
V. B. : Notre tout premier client était la SNCF. Nous avons analysé pour eux la perception que les consommateurs avaient de la cherté de leurs billets. Après des semaines d’efforts, nous avons ensuite obtenu un rendez-vous avec L’Oréal qui souhaitait connaître les raisons de la déconsommation des produits de soin pour le visage.
IN. : Quels types de service proposez-vous à vos clients ?
V. B. : Le suivi de marque est l’offre la plus simple que nous proposons. Combien de fois votre marque est-elle citée sur les réseaux ? L’est-elle plus ou moins que celles de vos concurrents ? Les avis publiés sont-ils positifs ou négatifs ? Tous ces informations sont récoltées par des outils d’e-réputation. Il nous suffit de définir des mots clés et le robot les récupère dans les conversations sur les réseaux sociaux.
IN. : Quelles plateformes analysez-vous ?
V. B. : Nous scrutons bien évidemment les messages diffusés sur les principaux réseaux sociaux comme Facebook, X, Instagram et TikTok mais nous analysons aussi les avis déposés sur les plateformes d’e-commerce comme Amazon et Fnac Darty car les marques souhaitent connaître les recherches qui sont faites sur eux par la majorité silencieuse. Nos analyses permettent aujourd’hui de faire bien plus que des suivis de marque.
IN. : Avez-vous des exemples ?
V. B. : Nous sommes aujourd’hui capables de faire des études ad-hoc pour nos clients. Notre principe est simple : « ask us anything » et on le fera pour vous. Les outils actuels permettent d’analyser n’importe quel sujet. Nous pouvons détailler les nouveaux codes du luxe ou prédire l’avenir du kefta. Tout est possible. Nous sommes aussi capables d’agréger toutes les expressions formulées sur un client sur une seule et même plateforme.
IN. : Qui sont vos clients ?
V. B. : Nous avons beaucoup de clients dans les produits de très grande consommation comme Danone et Carrefour et dans la beauté avec notamment L’Oréal, Yves Saint Laurent ou Klorane. Nous travaillons aussi pour des groupes dans la santé dont Pierre Fabre et de nombreuses autres entreprises comme Allianz, BNP Paribas, Ruinart, Orange ou Club Med.
IN. : Vous venez récemment de racheter une autre société…
V. B. : Oui, nous avons repris l’an dernier Social Wire qui est une agence spécialisée dans la détection d’insights sur les médias sociaux vidéos. Elle développe actuellement un concept très innovant. Lorsqu’un client fait appel à elle pour développer un nouveau produit, elle se charge de trouver des créateurs de contenu spécialisés dans ce domaine sur le web et elle les réunit pour mettre au point et tester le produit voulu par la marque.
IN. : Vous avez vous-même changé de propriétaire en 2022…
V. B. : Oui, mais cette opération était assez originale car c’est Sonia et moi qui nous sommes chargées de trouver un nouveau repreneur. Nous avions en effet déjà revendu notre société, qui compte aujourd’hui plus de 80 collaborateurs, à Webedia en 2015. Après sept années heureuses, nous voulions nous rapprocher d’un nouveau groupe qui nous permette d’accélérer notre développement et c’est ce que nous avons trouvé avec European Digital Group.