18 octobre 2024

Temps de lecture : 4 min

Les machines nous sont supérieures… une solution plutôt qu’un problème ?

Arte dévoilait hier soir à la télévision les premiers épisodes de sa série Rematch qui raconte le duel de 1997 entre le superordinateur Deep Blue, conçu par IBM, et le champion du monde d’échecs Garry Kasparov. Une série passionnante pour un récit qui l'est tout autant en continuant de nous apprendre des choses sur la place des machines… et maintenant des IA, dans nos vies.

En 1997, Deep Blue, le superordinateur d’IBM, secouait le monde des échecs en battant le champion du monde de la discipline Garry Kasparov par quatre victoires à deux dans une série de six parties. Cette victoire a marqué un tournant dans le développement de ce que l’on appelait plus communément les « machines pensantes », un terme dont la paternité est souvent attribuée à Frank Herbert dans son roman Dune.

Pour la première fois, un ordinateur s’avérait supérieur au meilleur des humanoïdes dans ce qui était alors le jeu de stratégie le plus prestigieux au monde. 27 après, Arte explore à nouveau ce grand récit des temps modernes avec Rematch, une série de fiction qui lui est entièrement dédiée. Déjà disponible sur la plateforme en ligne d’Arte, elle a été diffusée pour la première fois à la télévision ce jeudi 17 octobre en prime time. Pensée comme un « thriller mental », la série a mis six ans avant de voir le jour, comme l’expliquait hier au Point son producteur Bruno Nahon.

Échec et KO

Le pitch : « Février 1996. Garry Kasparov, 32 ans, considéré comme le meilleur joueur d’échecs de l’histoire, s’apprête à affronter le superordinateur Deep Blue dans un duel homme/machine destiné à rester dans les annales. Après une première manche déstabilisante, il parvient à remporter la partie. Helen Brock, du département de recherche et développement d’IBM, voit son poste menacé et veut à tout prix le convaincre d’accepter un match retour. Elle offre au créateur de Deep Blue, un ingénieur solitaire surnommé « PC« , les moyens de concevoir un ordinateur beaucoup plus puissant. Paul Nelson, un ancien champion américain connu pour avoir arraché un match nul à Kasparov, est bientôt recruté… »

Des mots de son réalisateur, Yan England, lui-même, les parties sont écrites et filmées « comme des matchs de boxe, avec des phases d’observation, des échanges plus ou moins rapides, des KO, des impacts (le son des pièces sur l’échiquier), le bruit du chronomètre… J’ai essayé de montrer les échecs comme une expérience physique et émotionnelle ». Avant d’ajouter : « Derrière le face-à-face immobile autour de l’échiquier, se joue un affrontement psychologique terrible, d’autant plus inspirant qu’il se déroule entre un être humain et une machine ». Une manière de soulever des questions de société toujours aussi actuelles autour de la place de l’intelligence artificielle dans nos vies.

Une défaite qui nous fait grandir

Si les facultés technologiques de Deep Blue n’ont plus grand-chose à voir avec celles des IA actuelles – n’importe quel smartphone d’aujourd’hui serait capable de pulvériser Deep Blue sur le damier noir et blanc –, cet épisode est le parfait exemple de comment les humains et les machines seront amenés à cohabiter… quel que soit le domaine. Après sa défaite, Garry Kasparov n’a eu aucun mal à collaborer avec les superordinateurs de son temps pour essayer de réinventer son sport. Celui que beaucoup considèrent comme le plus grand joueur d’échecs de tous les temps – au moins jusqu’à l’avènement de l’alien Magnus Carlsen qui l’a battu alors qu’il n’avait que 13 ans – a ainsi dévoilé en juin 1998 le jeu Advanced Chess, une variante du jeu où le joueur se fait constamment assister d’un ordinateur.

À quel moment la divergence entre les capacités de l’homme et celles de l’ordinateur devient-elle si grande que l’homme n’a plus rien à apporter ? « Dans les premiers temps, je pense que l’idée de Kasparov était qu’il y a certains types de situations aux échecs que l’homme comprend mieux, et d’autres que l’ordinateur comprend mieux, et donc que la combinaison optimale est de laisser l’homme exercer son jugement pour savoir s’il doit suivre les conseils de l’ordinateur », expliquait Christopher Chabris, un spécialiste des sciences cognitives doublé d’un champion d’échecs, qui couvre la scène dans une chronique pour le Wall Street Journal.

Avant de conclure : « Cette proportion s’est réduite au fil du temps… au point que l’on commence à courir le risque que l’humain pense qu’il sait mieux alors que ce n’est pas le cas (…). Peut-être devons-nous aussi en apprendre davantage sur la manière d’optimiser ces nouveaux outils ».

Mettre l’égo en dehors de tout ça

Cette idée qu’il vaut mieux unir ses forces aux machines plutôt que de lutter en vain est depuis longtemps partagée par Gary himself. Lors d’une intervention à la conférence Train AI qui s’était tenue à San Francisco en 2018, ce dernier avait ainsi retracé les étapes qui l’ont convaincu de la manière dont les humains et les machines pourraient un jour travailler ensemble pour créer une « intelligence augmentée ». Il en est sûr : à termes, « L’IA nous aidera à libérer la créativité humaine. Les humains ne seront jamais remplacés… tant qu’ils acceptent de s’augmenter grâce aux machines. »

Pour lui, il est évident que nous serons témoins de l’avènement d’un nouveau type de « machines pensantes » douées d’« intelligence augmentée » grâce à la collaboration totale entre homme et machine. Une révolution technologique qui conduira à repenser en profondeur la grande majorité des emplois pour ouvrir la voie à de nouvelles carrières et industries. Il imagine un avenir où les humains n’auront plus besoin de devenir des codeurs en herbe pour travailler avec les IA car les machines seront suffisamment avancées pour comprendre des instructions simplement en écoutant une voix humaine.

« J’ai perdu [aux échecs] mais j’ai survécu, et j’ai immédiatement pensé « si vous ne pouvez pas les battre, rejoignez-les ». La preuve que la vraie bête noire de Kasparov restera à jamais un gamin norvégien de 13 ans… qui a bien grandi depuis.

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