Ainsi les termes tels que «contrôle», «surveillance », « clandestins », « expulsion » ou « fermeture des frontières» reflètent-ils une approche sécuritaire. Cette focalisation sur la dimension sécuritaire renforce l’idée d’une menace potentielle que l’immigration représenterait pour la cohésion sociale et l’ordre public. De quoi renvoyer une image plus que délétère de cette question et contribuer à mettre en tension la société.
En opposition à ces narratifs dominants, il y a un autre traitement qui cherche à humaniser le sujet de l’immigration. Sous cette facette, le vocabulaire se fait plus empathique et inclusif, mettant en avant des mots comme «réfugiés», « demandeurs d’asile », « intégration », « solidarité » ou encore «droits humains». Cette approche vise à rappeler les causes profondes des mouvements migratoires, telles que les guerres, les persécutions ou les crises humanitaires, et à souligner la nécessité d’une réponse plus humanitaire et solidaire.
Entre sensationnalisme et responsabilité éditoriale
L’équilibre entre sensationnalisme et responsabilité éditoriale est un enjeu majeur dans le traitement de l’immigration. Si certains médias peuvent être tentés par un discours alarmiste pour capter l’attention du public, d’autres s’efforcent de proposer une analyse plus nuancée et équilibrée, en contextualisant les enjeux et en donnant la parole aux principaux concernés : les migrants.
Une étude de l’institut Convergences Migrations, s’appuyant sur des méthodes de traitement automatique du langage naturel pour analyser les sujets spécifiques liés à l’immigration dans les médias français, a corroboré ces enseignements avec un ajout. Il apparaît que certains canaux médiatiques, suivant leur audience, mettent l’accent sur des aspects différents de l’immigration. Par exemple, des chaînes comme TF1, qui sont plus regardées par des individus défavorables à l’immigration, l’associent fréquemment à son coût ou au terrorisme, tandis que des chaînes à l’audience perçue comme plus favorable à l’immigration, telles qu’Arte, privilégient des sujets comme le conflit syrien ou la crise en Méditerranée. Même constat sur l’image renvoyée. L’institut Convergences Migrations estime ainsi que l’utilisation d’une rhétorique négative autour de l’immigration joue un rôle substantiel dans le façonnement des attitudes envers ce sujet, tendant à orienter l’opinion publique vers des positions anti-immigration. Ceci est d’autant plus marquant que dans d’autres pays la couverture médiatique de l’immigration est plus encline à susciter l’empathie et des réactions favorables chez les téléspectateurs.
Vers un nouveau récit ?
Face à ces constats, l’interrogation persiste sur la possibilité de forger un nouveau récit autour de l’immigration qui transcenderait les clivages et contribuerait à une meilleure compréhension des phénomènes migratoires. Un tel changement impliquerait une réflexion profonde sur le langage employé, les images diffusées et les histoires racontées, pour passer d’une logique de confrontation à une approche plus inclusive et constructive.
Ainsi, il apparaît clairement que le traitement médiatique de l’immigration en France est un miroir des tensions, des défis, mais aussi des opportunités de notre époque. À travers les mots et les images se jouent non seulement la représentation d’une réalité complexe mais également la construction de notre rapport à l’autre. Et si, dans la perspective d’un journalisme de solutions, les médias dans leur ensemble contribuaient à ériger une réalité plus complexe ?