Les écuries d’Augias du web commencent enfin à être nettoyées… Après des années de laisser-aller et pour tout dire d’excès en tous genres, les influenceurs et les marques qui font appel à leurs services semblent de plus en plus disposés à jouer cartes sur table afin de ne plus berner les internautes. Le tout dernier rapport de l’Observatoire de l’influence responsable établi par l’Autorité de régulation professionnelle de publicité (ARPP) montre que la transparence sur les contenus publiés par les leaders d’opinion sur les réseaux sociaux continue de progresser.
Doit encore mieux faire
L’an dernier, 89% des publications issues de collaborations commerciales comportaient au moins un début d’identification (conformes ou améliorables) contre à peine 83% un an plus tôt et 73% en 2020. Pour obtenir ces résultats, l’ARPP a utilisé les solutions technologiques de trois plateformes spécialisées dans l’agrégation de contenus (Reech, Kolsquare et Traackr). 31.004 contenus publiés en 2022 par 7306 influenceurs sur YouTube, Instagram et TikTok ont ainsi été analysés par l’IA. Un groupe de quatre personnes a également été mis en place pour compléter cette étude. Ces analyses ont permis de déceler 17.276 collaborations commerciales avérées. Si 89% de ces contenus comportaient au moins un début d’identification, à peine plus de la moitié d’entre eux (53%) respectaient à la lettre les règlements en vigueur. La loi du 9 juin 2023 visant à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives et les arnaques a en effet singulièrement compliqué la vie des influenceurs. « Le ton s’est durci à l’encontre des acteurs les moins responsables, reconnaît Mohamed Mansouri, le directeur délégué de l’ARPP. Injonctions de cesser des pratiques illicites, procès-verbaux pénaux, atteinte réputationnelle… La DGCCRFsévit. » Au mois d’août, l’influenceuse Poupette Kenza, qui compte 1,1 million d’abonnés sur Instagram, a été condamnée à payer une amende de 50.000 euros par les services de la répression des fraudes. Beaucoup reste toutefois à faire surtout parmi les plus petits créateurs de contenus.
Les micros sont les moins réglos
Ceux avec moins de 10.000 abonnés sont aujourd’hui les moins rigoureux. 23% des micro-influenceurs n’ont ainsi pas clairement identifié leurs collaborations commerciales. Au premier trimestre 2023, ce taux de manquements chez les influenceurs certifiés par l’ARPP atteignait, lui, moins de 1%. Les vedettes des réseaux comme Lena Situations (@lenamahfouf) qui compte 4,4 millions de followers sur Instagram, Lenna Vivas (@lenna_vivas-profile) et ses 7,7 millions d’abonnés sur TikTok ou Pierre Croce (@pierrecroce) et ses 3,9 millions de fidèles sur YouTube sont aujourd’hui presque tous accompagnés par des juristes et des avocats qui les conseillent sur les démarches à suivre pour « rester dans les clous ». Leurs contenus publicitaires sont, par ailleurs, presque « anecdotiques ». Ainsi, sur les 128.114 contenus publiés par des créateurs certifiés au premier semestre 2023, à peine 7783 étaient sponsorisés, soit à peine 6%.
Attendre n’est plus une option
Cette certification proposée par l’ARPP, qui devrait être prochainement reconnue à l’échelle européenne, a déjà été décrochée par plus de 1000 leaders d’opinion. Le taux de réussite à cet examen atteint toutefois à peine 76%. Des efforts restent donc encore à faire mais la profession affirme être repartie sur de bons rails. « Les 12 derniers mois ont été une année charnière pour l’influence commerciale », résume Mohamed Mansouri. L’urgence est là. Johanna Sebag, la fondatrice de l’agence Dresscode, nous affirmait récemment ressentir un sensible coup de balancier des marques en faveur des médias traditionnels aux dépens du marketing d’influence. Pour rassurer les annonceurs, les créateurs de contenus vont devoir, plus que jamais, montrer patte blanche et respecter la loi. Mieux vaut tard que jamais…