INfluencia : les Rencontres de l’Udecam reviennent ce jeudi 31 août 2023 avec leur dîner qui lance désormais la saison et précède plusieurs matinées de réflexion. Comment cette nouvelle formule a-t-elle été accueillie ?
Damien de Foucault : en scindant deux aspects, une dimension festive totalement assumée avec un dîner de rentrée qui rassemble les annonceurs, puis des matinées de conférences thématisées, on parle davantage de l’Udecam tout au long de l’année. Les annonceurs ont répondu présents aux thématiques que nous avons développées et n’ont jamais été aussi nombreux. Ils représentaient en moyenne 25 % de l’audience des matinées de travail, ce qui n’a pas toujours été le cas auparavant… Ils investissent tellement dans la communication autour de leurs marques que le trading et les méthodes de travail des agences médias les intéressent au premier chef, d’autant que les annonceurs français sont de loin les plus instruits en matière de mesure. C’est sans doute consubstantiel de notre mentalité française d’académiciens, épris de justice, qui adorent peser, mesurer, contrôler…
Il va falloir que l’on parle des valeurs de notre métier, ce « people business » où l’expertise est notre plus forte valeur ajoutée
IN : la mesure sera d’ailleurs au cœur de la thématique des 17e Rencontres de l’Udecam…
D. de F. : nous avons choisi de placer cette édition sous une thématique chapeau qui aborde la valeur et les valeurs, que nous avons intitulée « Expertises et mesures, créatrices de valeurs pour les marques et notre écosystème ?». 2024 va connaître un tournant dans les indicateurs et la mesure d’audience de Médiamétrie, avec des mesures dédupliquées cross device, sur fond d’évolution des conditions tarifaires voulues par les régies, autour du CPM plutôt que du GRP sur cible. La première matinée de travail, le 14 novembre, sera donc intitulée « Nouvelle mesure, nouvelle efficacité, nouveau trading » car il n’y a pas de valeur sans mesure. La deuxième, le 12 mars, sera centrée sur le thème « Talents, expertise, valeur… We are a people business ». Les agences média ont besoin de défendre ces valeurs au moment où la publicité n’a jamais été aussi décriée. Elle défend pourtant, au-delà de la préférence de marque, les valeurs des entreprises et une consommation plus responsable. Le métier fait aussi moins rêver les jeunes, même si on a vu un contre-exemple avec la mise en place de notre Commission jeunes talents. Il va aussi falloir que l’on parle des valeurs de notre métier, ce « people business » où l’expertise est notre plus forte valeur ajoutée.
IN : comment ce « people business » aborde-il la montée en puissance de l’intelligence artificielle ?
D. de F. : c’est un sujet central et un outil qu’il faut s’approprier sans créer de laissés pour compte. A nous de sensibiliser les uns et les autres sur nos « Ressources humaines » car si l’intelligence est artificielle, les émotions ne le sont pas. Il y a urgence à maîtriser ce sujet qui sera sous-jacent à nos deux rendez-vous.
IN : lors du dîner de rentrée de l’Udecam l’an dernier, la fusion TF1-M6 était le sujet qui tenait encore en haleine toute la profession, l’arrêt du processus ayant été annoncé quelques jours plus tard. Cette année, les Etats généraux de l’information sont annoncés pour le mois de septembre. Ces sujets sont-ils également importants pour l’Udecam ?
D. de F. : ces Etats généraux sont d’une importance capitale ! L’Udecam est concernée et impactée au premier chef car les agences médias sont les plus grands experts du contenu et que le contenu d’information constitue bien souvent l’environnement au sein duquel les marques déploient leur présence. Nous allons devoir suivre ces travaux de très près pour pouvoir ensuite conseiller les annonceurs et accompagner les marques vers des stratégies toujours plus efficaces et responsables. Il y a là, pour la publicité, un enjeu de citoyenneté majeur.
IN : en juillet, l’Udecam a annoncé son adhésion à l’European Association of Communication Agencies (EACA). Qu’en attendez-vous plus particulièrement, alors que la plupart de vos membres en sont également adhérents ?
D. de F. : c’est une source d’information de première main dans notre métier d’Affaires publiques, une dimension qui est devenue particulièrement importante. Même si notre autorité de tutelle est le ministère de la Culture, nous sommes souvent impactés par des mesures qui viennent de Bercy. On va par exemple rediscuter de la dématérialisation lors du projet de loi de Finances 2024. Notre droit est aussi de plus en plus impacté par des décisions qui se prennent à l’échelle européenne, avec l’European Media Freedom Act et autres… L’EACA permet aussi d’avoir une meilleure vision des comparaisons entre pays. Cela montre d’ailleurs que les agences médias françaises sont toujours moins rentables que dans d’autres pays, de l’ordre de 3 à 4 % en France contre 20 % dans d’autres pays. Il y a un vrai problème avec ce modèle et avec le maintien de la rentabilité des agences médias.
Il y a un vrai problème en France avec la rentabilité des agences médias. Les contrats ne peuvent pas rester sur des règles établies il y a plus de dix ans.
IN : quelles pistes pourraient être envisagées ?
D. de F. : en 2014, les principales organisations représentatives des agences de communication avaient lancé La Belle Compétition. Les contrats ne peuvent pas rester sur des règles établies il y a plus de dix ans, alors même qu’on n’a jamais vu un métier qui soit remis en question aussi souvent que celui d’agence médias. La viabilité des agences est liée au suivi des contrats de productivité. Il est donc temps de reposer la question de l’expertise et des talents, qui doivent être rémunérés à leur juste valeur, de remettre à jour, de développer et d’amplifier cette charte de bonnes pratiques et de l’insérer dans un référentiel de responsabilité des entreprises. On appelle aussi à la mise en place d’un Observatoire pour voir de quelle manière elle sera appliquée et aussi de mesurer la perception de la satisfaction.