27 mars 2023

Temps de lecture : 5 min

« L’important pour le club France, c’est que ce soit festif ! » Nathalie Péchalat

Nathalie Péchalat est présidente déléguée du Club France qui sera installé par le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) à la Grande Halle de la Villette pour les JO. Elle pilote la conceptualisation, la gestion et l’animation de ce lieu dédié aux passionnés de sport, qu’elle conçoit comme un point de rencontre animé, festif et fédérateur. Administratrice du CNOSF depuis 2021, l’ancienne championne de danse sur glace avait déjà été cheffe de mission de la délégation française pour les JO d’hiver de Pékin 2022. De 2020 à 2022, elle a été la première femme à présider la Fédération française des sports de glace. Une interview à retrouver dans le revue #42 d'INfluencia.
INfluencia : quel sera le rôle du Club France qui s’installera à la Grande Halle de la Villette pendant Paris 2024 ?

Nathalie Péchalat : Le Club France fait toujours le lien entre les olympiens, leur famille et leurs proches, et les médias. Comme les Jeux se dérouleront à domicile, l’effet sera encore renforcé. C’est aussi le lieu où nous accueillerons les dignitaires, le monde de l’entreprise et surtout le grand public, qui représentera le plus grand nombre de visiteurs sur ce site qui peut accueillir jusqu’à 20000 personnes à l’instant t. Il faut en quelque sorte créer un terrain de jeu commun et des salles pour échanger les uns avec les autres. C’est toute la difficulté de l’exercice, mais le site est grand et offre beaucoup de possibilités. La partie extérieure proposera des animations sportives et différentes démonstrations, avec un accès pour célébrer les athlètes. La culture de l’olympisme sera mise en avant avec des expositions, des conférences sur le pouvoir des Jeux ou l’équipe de France. Il y aura aussi des spectacles et des animations artistiques. La prérogative, c’est que ce soit festif ! Je voudrais aussi que le Club France offre une visibilité aux associations en lien avec le sport sur tous les sujets qui préoccupent la société, et propose des ateliers, par exemple avec des formations aux premiers secours.

 

Je ne sais pas si la France va réussir à devenir une nation sportive, mais le sport doit trouver une véritable place au sein de la société.

IN : il sera donc question d’éducation au sens large et d’inciter le public à faire du sport…

N.P. : j’y tiens beaucoup. Il faudrait notamment que les jeunes se prennent au jeu dans ce que le sport a de plus ludique, et qu’ils se rendent compte que ce n’est pas seulement une fabrique à champions, même si on est fiers d’en avoir et que le Club France sera là pour les célébrer. Le sport est aussi une occupation qui permet à chacun de trouver ce qui lui plaît et contribue à son bien-être, qui apprend le respect des règles, de l’adversaire et du coach, ce qui améliore la vie en société. J’aime l’idée que ceux qui n’ont pas forcément la fibre sportive mais que le sport intéresse, puissent travailler pour ce secteur que ce soit par le biais des sciences, de l’ingénierie ou à travers une implication associative. Je ne sais pas si la France va réussir à devenir une nation sportive, mais le sport doit trouver une véritable place au sein de la société. On part de loin et on ne peut que mieux

IN : une attention particulière sera-t-elle proposée aux nouveaux sports olympiques – break dance, skate ou escalade – appréciés des jeunes ?

N.P. : les animations sportives sont déléguées aux fédérations, qui décident de ce qu’elles organisent. Par souci d’équité, on ne met pas d’accent particulier sur certaines pratiques. Comme il faut de la place pour tout le monde, nous allons jouer sur la temporalité pour que chacun puisse trouver son bonheur.

IN : pendant les Jeux, comment le Club France va-t-il relayer ou amplifier l’engouement pour le sport ?

N.P. : selon les moments, on s’appuiera sur les résultats ou les histoires des athlètes, car le côté humain peut amener beaucoup de vocations et d’intérêt pour une discipline sportive. On n’a pas de visibilité en amont sur ce sujet. Les grands moments ne sont généralement pas guidés par l’organisateur mais répondent plutôt à un effet de groupe que l’on ne sait pas trop orienter. En revanche, il faudra être réactif.

 

proposer un Club France inclusif, éco-responsable, durable… Mais aussi de présenter les innovations françaises issues de la haute performance et qui peuvent ruisseler sur toute la société.

 

IN : Vous ne voulez pas proposer un Club France « classique ». Quelles sont les priorités ?

N.P. : il s’agira évidemment de proposer un Club France inclusif, éco-responsable, durable… Mais aussi de présenter les innovations françaises issues de la haute performance et qui peuvent ruisseler sur toute la société. En sciences et en ingénierie, notre pays est extrêmement novateur et puissant, mais n’a pas forcément les impulsions politiques pour faire le lien avec le monde sportif. Il serait intéressant que ce secteur et le grand public aient conscience de tout ce que le sport apporte pour rayonner et s’imposer comme une nation sportive. Cela suppose de mettre à contribution toutes les compétences et de créer des liens transversaux entre tous les domaines. La France a la chance d’être un pays qui valorise l’associatif mais on a aussi besoin de se professionnaliser. Certaines entreprises très engagées dans le sport pourraient y contribuer, mais il y a une vraie barrière entre le monde associatif ou politique et le privé. Il faudrait accorder aux entreprises davantage de garanties de stabilité sur les relations ou les partenariats qu’elles pourraient nouer avec le monde du sport.

 

IN : où en sont les relations avec l’univers de la culture et avec les territoires ?

N.P. : à ce stade, nous explorons tous les sujets sur la culture olympique et les animations artistiques. Nous sommes en lien avec vingt écoles d’architecture qui créeront les Archi-Folies, des pavillons temporaires accolés aux Folies de La Villette et organisées par groupement de disciplines sportives. Nous rencontrons les présidents de régions parce que la demande des territoires – comme des organes déconcentrés du CNOSF – est extrêmement forte. En Provence-Alpes-Côte d’Azur, Occitanie ou Auvergne-Rhône-Alpes, ils sont plus demandeurs que d’autres car, chez eux, le sport est très important. Des passerelles se créent également avec le monde de l’agriculture pour proposer des produits locaux ou régionaux, qui sont une autre manière de mettre en avant les territoires. Il y a aussi de grosses attentes du côté du ministère et nous faisons d’ailleurs un point tous les deux mois avec la ministre. Il est normal et justifié de devoir rendre des comptes puisqu’il y a un investissement au niveau des comptes publics. Au-delà de la finance, nous avons aussi une délégation de pratiques sportives. J’aime bien cette collaboration…

IN : Paris 2024 veut en effet laisser un héritage. Comment pourra-t-on mesurer l’apport du Club France ?

N.P. : cela pose la question des outils de mesure qui permettront d’évaluer cet héritage : le nombre de médailles, comme c’est souvent le cas, l’évolution du nombre de licenciés dans les fédérations… Autre chose ? Les effets de long terme ne sont pas aussi quantifiables que cela et tiennent beaucoup aux liens créés, aux orientations politiques, aux moyens financiers et aux ressources humaines… Le Club France ou les fédérations ne pourront pas à eux seuls permettre de juger l’impulsion qui aura été donnée en préparation et à l’occasion de Paris 2024. Ce sera aussi au gouvernement et aux futurs gouvernements de voir la place qu’ils accorderont au sport, et les moyens qu’ils sauront lui octroyer sur la durée.

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