Intégralité des articles disponibles en podcast, brèves d’actualité envoyées sur WhatsApp, articles payants à forte valeur ajoutée… La nouvelle formule du journal L’Express s’inspire des médias anglo-saxons en misant notamment sur les nouveaux usages du numérique et les formats qui en découlent. Une preuve que la presse traditionnelle est capable de s’adapter aux métamorphoses médiatiques de notre temps.
Depuis quelques semaines, les médias hexagonaux décrivent de concert le nouvel Express comme un « The Economist à la française ». Un coup de communication réussi pour Alain Weil, patron du journal et PDG d’Altice France, qui hisse un journal malmené par les rachats successifs au rang du prestigieux hebdomadaire britannique. Pourtant, l’inspiration est bien là. À l’image de son homologue outre-atlantique, l’Express propose aujourd’hui l’intégralité de ses articles en format podcast. « Nous proposerons 5h30 d’écoute et 60 articles par semaine. Le lecteur pourra soit lire, soit écouter le journal » explique Clément Delpirou, directeur général de SFR Presse. En prime, les podcasts seront lus par des comédiens afin d’imprimer un ton propre et identifiable.
Cette volonté de s’affirmer sur le terrain de l’audio se renforcera d’ailleurs au mois de mars avec la diffusion d’un journal sonore de vingt minutes chaque matin. Un podcast natif d’information dont la forme est encore inconnue. À la manière de The Economist au Royaume-Uni et du Washington Post aux Etats-Unis, tout deux pionniers de la « mise en son » d’articles, l’Express souhaite conquérir de nouveaux lecteurs sensibles au podcast tout en fidélisant sa base.
Développer une approche conversationnelle
L’Express innove également dans ses interactions avec son audience. À travers des groupes sur WhatsApp et Messenger, des brèves d’actualité dénichées par la rédaction seront envoyées fréquemment aux internautes. Nommés les indiscrets, ces contenus à l’origine imprimés sur la version papier seront désormais réservés aux abonnés afin de renforcer l’effet breaking news. « Avec le développement du numérique et des chaînes d’info, [nos brèves] étaient souvent éventées depuis plusieurs jours quand on les lisait dans la version print » explique Clément Delpirou. Ces courtes missives numériques permettront au journal d’entrer dans une temporalité plus chaude.
Ces indiscrets présentent également l’intérêt de développer une approche conversationnelle avec le lecteur. À l’heure où la participation active des internautes est encouragée par les plateformes, favoriser le dialogue personnalisé avec son audience pourrait permettre à L’Express de renforcer le lien avec ses lecteurs.
Suppression de 70 postes dont 40 journalistes
Côté print, la nouvelle maquette de L’Express ressemble à s’y méprendre à celle de The Economist. La une de l’hebdomadaire français offre la même place centrale au dessin, place son logo dans la même position en haut à gauche et se vêt du même rectangle rouge que son confrère britannique. L’Express va même jusqu’à reprendre minutieusement la sélection de quatre titres d’article que propose l’hebdomadaire anglo-saxon. À l’intérieur du journal, la pagination passera de 120 à 90 pages tandis que le nombre de photos sera réduit et la police de caractère plus resserrée. Objectifs affichés : réduire les coûts et faire de la place pour « 50% d’articles en plus » justifie Alain Weill.
Miser davantage sur la publicité que sur la force éditoriale d’un journal…
Autant d’innovations graphiques et éditoriales qui ambitionnent de relancer la croissance d’un journal endolori. Car le prix à payer est conséquent : le média achève un plan de suppression de 70 postes dont 40 journalistes tandis qu’au même moment, une campagne de communication de 4 millions d’euros est envisagée par Alain Weil. Forcé de constater qu’aujourd’hui, on mise davantage sur la publicité que sur la force éditoriale d’un journal pour en assurer la pérennité.