8 novembre 2017

Temps de lecture : 5 min

L’eco-branding : quand une agence repense la RSE des annonceurs

L'éco-branding vous connaissez ? Non, c'est normal ça vient de sortir. Le concept est signé Interbrand Paris qui, pour Citéo, innove avec une nouvelle démarche d’éco-conception d’image de marque conciliant écologie et impact visuel.

 L’éco-branding vous connaissez ? Non, c’est normal ça vient de sortir. Le concept est signé Interbrand Paris qui, pour Citéo, innove avec une nouvelle démarche d’éco-conception d’image de marque conciliant écologie et impact visuel.

Faire dialoguer les objets avec les volumes. Insérer des courbes et des traits pour mieux personnaliser. Il paraîtrait que le design est à l’origine de tout. Et quand il permet une nouvelle approche de branding plus écologique et économique, le design invite l’éco-conception dans l’industrie publicitaire.  » Elle se développe dans de nombreux domaines et nous devons aussi, dans nos métiers, y réfléchir sérieusement « , assure Véronique Rheims, executive strategy director d’Interbrand Paris.

En septembre dernier l’agence a réalisé une campagne de communication globale pour Citéo, née du rapprochement entre écofolio et éco-emballages. Pour incarner et pour défendre les valeurs de l’économie circulaire, la nouvelle marque devait dépasser une démarche de branding classique et mettre en actes les principes qui animent sa nouvelle ambition. C’est là que l’éco-conception entre en scène dans le scénario d’Interbrand. La démarche consiste à limiter l’impact environnemental tout en gardant le plus d’impact visuel possible. Elle a donné naissance à une nouvelle approche du design, l’éco-branding.

Concrètement, chaque ingrédient de Citéo a été fait pour limiter la quantité d’encre, le nombre de pages imprimées et le poids des fichiers en digital. Que ce soit l’éco-logo qui réconcilie performance visuelle et performance écologique et économique; l’éco-typographie d’accompagnement choisie en fonction de son encombrement minimal, la Gill Sans; ou bien encore l’éco-iconographie détourée sur fond blanc, pour limiter la surface imprimée.  » Il ne s’agit pas de militantisme écolo mais de faire en sorte que les marques puissent devenir des acteurs positifs de la transition écologique. Cela passe par remettre les sujets RSE au cœur de leur stratégie et de leur expérience de marque « , nous explique Véronique Rheims. INfuencia a voulu aller plus loin dans l’explication. Interview.

IN : comment résumeriez-vous la nature, l’intention et l’objectif de l’éco-branding qui, sur le papier, peut se définir par la création d’un branding visuel à empreinte carbone réduite ?

Véronique Rheims : l’éco-branding est né d’une réflexion sur la manière dont une marque, en l’occurrence Citéo, acteur majeur de l’économie circulaire, devait définir sa nouvelle expérience de marque. Il nous a semblé qu’une marque engagée dans l’économie circulaire qui souhaitait incarner la réconciliation entre la performance économique et la performance environnementale, devait se construire sur les fondamentaux de sa promesse de marque. L’intention initiale était que ce nouvel éco-organisme fasse de l’éco-branding son faire-part de naissance. C’est en travaillant sur la manière dont on pouvait trouver le juste équilibre entre impact, différentiation et qualité d’engagement, critères traditionnels de l’expérience de marque d’une part, et préoccupations écologiques d’autre part que nous nous sommes dit qu’il y avait là une démarche intéressante qui méritait d’être formalisée. Avec Citeo, nous avons voulu rendre ce design process Open source. En adoptant le principe de l’éco-branding, Citéo est devenue la première marque éco-brandée, ouvrant ainsi le chemin d’une nouvelle approche de design de marque éco-friendly. L’enjeu étant aussi d’optimiser la performance économique du branding, parce qu’elle permet de faire aussi bien en utilisant moins de ressources.

IN : limiter la quantité d’encre, le nombre de pages imprimées et le poids des fichiers n’a rien de super novateur sur le papier. Brander un concept est-il un moyen de donner l’impression que c’est nouveau ?

V.R. : ces préoccupations ne sont pas nouvelles lorsqu’on se place du côté de l’édition au sens large ou des IT. En revanche ce qui est nouveau, c’est de les placer au cœur de la démarche de branding. Cela va au delà de la simple préoccupation RSE, c’est véritablement avoir une réflexion volontariste sur cette recherche de double performance. Chaque outil de l’éco-branding pris isolément n’a rien de nouveau. Mais les réunir tous ensemble autour d’une démarche commune d’éco-conception d’image de marque, qui repense en amont les ingrédients visuels d’une marque pour limiter son impact écologique et économique tout en préservant ou en amplifiant son impact visuel, ça c’est nouveau. Et ça ne s’est jamais fait avant Citéo.

IN : est-ce que ce qui relève du bon sens écologique obligatoire mérite un terme et un concept dédiés présentés comme une approche disruptive ? Et n’est-ce pas la preuve que l’intention écologique dans les modes de production reste à l’état embryonnaire ?

V.R. : le bon sens écologique reste malheureusement la chose la moins bien partagée dans l’univers du branding et de l’expérience de marque, où l’engagement des consommateurs et des clients reste la priorité absolue. C’est là que l’éco-branding prend tout son sens : ne rien renoncer en terme de performance d’engagement et d’expérience tout en optimisant l’impact écologique, c’est un discours totalement nouveau dans l’univers du branding. La transformation environnementale est devenue un sujet de société majeur, on voit de nouvelles initiatives se développer partout, pour tous et dans tous les secteurs (énergie, transport, alimentaire, textile…). Mais la question de la transformation environnementale n’est que très rarement exprimée dans les agences de branding et plus largement dans les agences de communication. L’éco-branding peut être une réponse à la question de la transformation environnementale des marques.

IN : la première intention est-elle de convaincre que l’écologie n’est pas l’ennemie de l’économie et qu’en faisant des économies on réduit son empreinte carbone pour en faire un produit d’appel auprès des millennials ?

V.R. : il ne s’agit en rien de cela. Il ne s’agit pas de dire, de convaincre, mais de faire. Il s’agit pour les marques qui se veulent responsables d’avoir la possibilité d’être cohérentes par rapport à leurs engagements RSE, et d’être attentives aux conséquences écologiques de leurs actions de communication et de marketing. C’est l’attention aux petits détails qui, si elle se multiplie, peut avoir un impact plus large, et c’est cela qui nous intéresse. Et si cette initiative peut susciter une réflexion parmi les professionnels de la communication et du marketing, c’est déjà énorme. Car si aujourd’hui les marques doivent être  » cool  » elles devront aussi être  » good  » pour attirer toute une nouvelle génération de  » consom’acteurs « . Si hier la laideur se vendait mal, demain l’inconscience se vendra très mal.

IN : comment pérenniser dans le temps l’éco-branding comme valeur de marque et peut-il devenir un label ? Si oui, qui le créera ?

V.R. : nous pensons que de plus en plus de marques souhaiteront intégrer cette dimension dans leurs approches du branding et de l’expérience de marque. La question à se poser est : pouvons nous faire aussi bien, mais en optimisant l’impact écologique. C’est une réflexion qui doit être menée au cas par cas. Ce qui reste encore complexe, c’est de quantifier précisément les gains écologiques, et avant de créer un label, c’est ce travail de quantification qui doit être fait. Nous avons commencé, mais il reste encore beaucoup de travail à faire.

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